Puissance plume
26 september 2005, 07:45
Journal de la Haute-Marne - 25.09.05
Les anti-Bure ont de l'énergie
Plus de 5000 personnes ont sillonné hier les rues de Bar-le-Duc pour
s'opposer �* l'enfouissement des déchets radioactifs, notamment �* Bure. Et
par des actions symboliques et bon enfant, ont fustigé un "débat bidon"
Les collectifs opposés �* l'enfouissement des déchets radioactifs ont réussi
leur test, hier �* Bar-le-Duc. A l'appel de plusieurs associations, près de
5000 personnes ont sillonné les rues de la ville, menant des actions
symboliques.
Une première d'ampleur nationale. De mémoire de Barisien, on n'avait pas vu
un tel déploiement dans la préfecture meusienne. Hier, �* l'appel des
collectifs d'associations opposées �* l'enfouissement de déchets nucléaires,
près de 5000 manifestants (3000 selon la police) ont battu le pavé.
Participation et couverture médiatique sont au plus haut : test réussi pour
les organisateurs meusiens et haut-marnais.
"Ré-sis-tance !", criait une militante suisse de l'association contrAtom, de
Genève. C'est bien le sentiment qui prédomine �* l'issue de cette
manifestation. Bure, sujet jusqu'ici local, prend une dimension nationale,
voire internationale. Opposants �* l'enfouissement de déchets nucléaires
-militants anti-nucléaire tout court, aussi-, élus et simples citoyens, ils
sont venus de toute la France (Gard, Midi toulousain, Normandie, Oise,
Nord, etc), d'Allemagne ou de Suisse. Pour "résister", comme cette
Meusienne, accompagnée de son fils "et de ses copains de lycée". Se faire
entendre, surtout.
Consultation légitimée
Slogans, pancartes, tracts, affiches, tee-shirts... Les moyens étaient
divers. Le message, 1000 fois lu dans la journée, toujours le même : "Ni
ici, ni ailleurs". du hall des brasseries, d'où le cortège est parti, �* la
préfecture, en passant par le Conseil général, la manifestation, bon enfant
mais déterminée, a démontré un potentiel de mobilisation jamais atteint.
Loin des maigres rassemblements devant les grilles du laboratoire de Bure.
Au Conseil général, une délégation a remis au président Christian Namy un
carton plein des 45 000 pétitions signées demandant l'organisation d'un
référendum sur l'enfouissement de déchets en Meuse et Haute-Marne. A la
préfecture, une motion �* l'attention du gouvernement, stigmatisait �*les
"impasses" du programme nucléaire français.
Avant que le rassemblement ne se disloque, place Reggio, les invités
nationaux (lire ci-dessous) et locaux ont pris la parole. Pour insister
encore sur le fait que la mobilisation légitime la demande de consultation
populaire. Le débat de 2006 �* l'Assemblée nationale sera-t-il influencé par
la pression de la rue ? Une chose est sûre : les opposants ne "lâcheront
pas les politiciens. Il faut les marquer �* la culotte, leur mordre les
mollets", arguait l'une d'eux. Rien n'est encore joué, mais après cette
journée, les opposants �* l'enfouissement ont gagné en assurance.
Alain Krivine : "Un autre choix de société"
Alain Krivine, porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire, menait
ses troupes, venues nombreuses, hier. Son mot d'ordre : les choix de
société, forcément "mauvais", et la façon de les changer.
Le Journal de la Haute-Marne : Vous considerez-vous comme faisant partie
d'une résistance citoyenne ?
Alain Krivine : Bien sûr. On suit le mouvement depuis le début. La
résistance au tout-nucléaire, c'est le même combat que celui des faucheurs
volontaires de champs d'OGM. Il faut organiser cette résistance, afin de
faire évoluer les choix de notre société.
JHM : Concrètement, ça signifie ?
A.K. : Consommer différemment. Envisager une baisse d'utilisation des
énergies. Par exemple, développer une politique de transports collectifs
plus efficace. Le problème, c'est qu'en France on fait des choix
énergétiques qui nous poussent �* une consommation maximum. On voit ce que
ça donne actuellement avec le pétrole...
JHM : Si on n'a plus de pétrole, il faut bien d'autres sources énergétiques.
Peut-on arrêter le programme nucléaire aujourd'hui ?
A.K. : La première chose �* régler, c'est les déchets. Ils doivent tout
d'abord rester sur les lieux de production. Déj�*, ça éviterait les
problèmes de transports. Après c'est clair, il faut stopper le programme.
Mais ça n'ira pas tout seul : il faut plus de crédit pour déveloper les
énergies alternatives.
Jacques Gaillot : "Mobilisation réconfortante"
Mgr Jacques Gaillot, évêque de Partenia, homme d'église engagé originaire de
Saint-Dizier, a fait le déplacement "exprès, en bus depuis Paris", pour
assister �* la manifestation. Il souligne la forte mobilisation, surtout
chez les jeunes.
Le Journal de la Haute-Marne : On vous sait engagé. On sait moins que le
combat contre le nucléaire est l'un de vos chevaux de bataille...
Jacques Gaillot : Déj�* en 1995, j'ai manifesté contre la reprise des essais
nucléaires dans le Pacifique, �* Mururoa. J'ai également participé, il y a
plusieurs années, �* une autre manifestation, �* Bure même.
JHM : Mais c'est la première fois que vous participez, �* côté de chez vous,
�* un rassemblement d'une telle ampleur ?
J.G. : Oui, et ça prouve qu'on n'enfouira pas les citoyens de Meuse et de
Haute-Marne. C'est réconfortant, de voir tous ces gens, tous ces jeunes,
qui n'acceptent pas que leur pays devienne une poubelle nucléaire. Car
c'est bien l�* le problème : il s'agit moins de trouver un lieu qu'une
solution pour les déchets.
JHM : Votre franc-parler est-il compatible avec votre engagement spirituel ?
J.G. : On m'a souvent reproché, au sein de l'église et en dehors, cet
engagement. Mais je suis aussi un citoyen. L'église ne doit pas vivre en
dehors du monde. Ce que je fais l�*, il me faut, il nous faut le dire. Pus
tard, nos successeurs nous féliciteront.
Corinne Lepage : "Manque de débat public en France"
Corinne Lepage, présidente du parti politique Cap 21, ancienne ministre de
l'Environnement de 1995 �* 1997, était présente. Elle revient sur le besoin
de débat public en France, qui en manque cruellement.
Le Journal de la Haute-Marne : Pensez-vous que le débat sur la gestion des
déchets nucléaires, lancé avec les auditions publiques, est utile ?
Corinne Lepage : C'est un faux débat. On laisse le choix aux citoyens entre
Bure et Bure, puisqu'il n'y a pas d'autre site envisagé. Sans compter que
l'information n'est pas donnée, ou alors de manière univoque. Je suis
choquée de la façon dont le débat public évolue en France.
JHM : La consultation est truquée, selon vous ?
C.L. : On fait croire qu'on débat avec la population, mais c'est totalement
formel : les décisions sont déj�* prises. C'est pour la façade, sans la
maison qui va derrière. Il faut réellement consulter la population, donc
organiser ce référendum demandé par les élus meusiens et haut-marnais
opposés �* l'enfouissement (elle l'a signé plus tôt dans la journée, Ndlr).
D'ailleurs, je lance un appel �* tous les départements pour organiser une
campagne de signatures afin de mettre en place des référendums sur le
nucléaire partout, comme la loi le permet.
JHM : Vous souhaitez l'arrêt complet du programme ?
C.L. : Sur ce point, mon avis diverge de celui des Verts. Je ne dis pas
"Stop tout de suite", mais "demandons l'avis des Français". Comme dans une
démocratie.
Les anti-Bure ont de l'énergie
Plus de 5000 personnes ont sillonné hier les rues de Bar-le-Duc pour
s'opposer �* l'enfouissement des déchets radioactifs, notamment �* Bure. Et
par des actions symboliques et bon enfant, ont fustigé un "débat bidon"
Les collectifs opposés �* l'enfouissement des déchets radioactifs ont réussi
leur test, hier �* Bar-le-Duc. A l'appel de plusieurs associations, près de
5000 personnes ont sillonné les rues de la ville, menant des actions
symboliques.
Une première d'ampleur nationale. De mémoire de Barisien, on n'avait pas vu
un tel déploiement dans la préfecture meusienne. Hier, �* l'appel des
collectifs d'associations opposées �* l'enfouissement de déchets nucléaires,
près de 5000 manifestants (3000 selon la police) ont battu le pavé.
Participation et couverture médiatique sont au plus haut : test réussi pour
les organisateurs meusiens et haut-marnais.
"Ré-sis-tance !", criait une militante suisse de l'association contrAtom, de
Genève. C'est bien le sentiment qui prédomine �* l'issue de cette
manifestation. Bure, sujet jusqu'ici local, prend une dimension nationale,
voire internationale. Opposants �* l'enfouissement de déchets nucléaires
-militants anti-nucléaire tout court, aussi-, élus et simples citoyens, ils
sont venus de toute la France (Gard, Midi toulousain, Normandie, Oise,
Nord, etc), d'Allemagne ou de Suisse. Pour "résister", comme cette
Meusienne, accompagnée de son fils "et de ses copains de lycée". Se faire
entendre, surtout.
Consultation légitimée
Slogans, pancartes, tracts, affiches, tee-shirts... Les moyens étaient
divers. Le message, 1000 fois lu dans la journée, toujours le même : "Ni
ici, ni ailleurs". du hall des brasseries, d'où le cortège est parti, �* la
préfecture, en passant par le Conseil général, la manifestation, bon enfant
mais déterminée, a démontré un potentiel de mobilisation jamais atteint.
Loin des maigres rassemblements devant les grilles du laboratoire de Bure.
Au Conseil général, une délégation a remis au président Christian Namy un
carton plein des 45 000 pétitions signées demandant l'organisation d'un
référendum sur l'enfouissement de déchets en Meuse et Haute-Marne. A la
préfecture, une motion �* l'attention du gouvernement, stigmatisait �*les
"impasses" du programme nucléaire français.
Avant que le rassemblement ne se disloque, place Reggio, les invités
nationaux (lire ci-dessous) et locaux ont pris la parole. Pour insister
encore sur le fait que la mobilisation légitime la demande de consultation
populaire. Le débat de 2006 �* l'Assemblée nationale sera-t-il influencé par
la pression de la rue ? Une chose est sûre : les opposants ne "lâcheront
pas les politiciens. Il faut les marquer �* la culotte, leur mordre les
mollets", arguait l'une d'eux. Rien n'est encore joué, mais après cette
journée, les opposants �* l'enfouissement ont gagné en assurance.
Alain Krivine : "Un autre choix de société"
Alain Krivine, porte-parole de la Ligue communiste révolutionnaire, menait
ses troupes, venues nombreuses, hier. Son mot d'ordre : les choix de
société, forcément "mauvais", et la façon de les changer.
Le Journal de la Haute-Marne : Vous considerez-vous comme faisant partie
d'une résistance citoyenne ?
Alain Krivine : Bien sûr. On suit le mouvement depuis le début. La
résistance au tout-nucléaire, c'est le même combat que celui des faucheurs
volontaires de champs d'OGM. Il faut organiser cette résistance, afin de
faire évoluer les choix de notre société.
JHM : Concrètement, ça signifie ?
A.K. : Consommer différemment. Envisager une baisse d'utilisation des
énergies. Par exemple, développer une politique de transports collectifs
plus efficace. Le problème, c'est qu'en France on fait des choix
énergétiques qui nous poussent �* une consommation maximum. On voit ce que
ça donne actuellement avec le pétrole...
JHM : Si on n'a plus de pétrole, il faut bien d'autres sources énergétiques.
Peut-on arrêter le programme nucléaire aujourd'hui ?
A.K. : La première chose �* régler, c'est les déchets. Ils doivent tout
d'abord rester sur les lieux de production. Déj�*, ça éviterait les
problèmes de transports. Après c'est clair, il faut stopper le programme.
Mais ça n'ira pas tout seul : il faut plus de crédit pour déveloper les
énergies alternatives.
Jacques Gaillot : "Mobilisation réconfortante"
Mgr Jacques Gaillot, évêque de Partenia, homme d'église engagé originaire de
Saint-Dizier, a fait le déplacement "exprès, en bus depuis Paris", pour
assister �* la manifestation. Il souligne la forte mobilisation, surtout
chez les jeunes.
Le Journal de la Haute-Marne : On vous sait engagé. On sait moins que le
combat contre le nucléaire est l'un de vos chevaux de bataille...
Jacques Gaillot : Déj�* en 1995, j'ai manifesté contre la reprise des essais
nucléaires dans le Pacifique, �* Mururoa. J'ai également participé, il y a
plusieurs années, �* une autre manifestation, �* Bure même.
JHM : Mais c'est la première fois que vous participez, �* côté de chez vous,
�* un rassemblement d'une telle ampleur ?
J.G. : Oui, et ça prouve qu'on n'enfouira pas les citoyens de Meuse et de
Haute-Marne. C'est réconfortant, de voir tous ces gens, tous ces jeunes,
qui n'acceptent pas que leur pays devienne une poubelle nucléaire. Car
c'est bien l�* le problème : il s'agit moins de trouver un lieu qu'une
solution pour les déchets.
JHM : Votre franc-parler est-il compatible avec votre engagement spirituel ?
J.G. : On m'a souvent reproché, au sein de l'église et en dehors, cet
engagement. Mais je suis aussi un citoyen. L'église ne doit pas vivre en
dehors du monde. Ce que je fais l�*, il me faut, il nous faut le dire. Pus
tard, nos successeurs nous féliciteront.
Corinne Lepage : "Manque de débat public en France"
Corinne Lepage, présidente du parti politique Cap 21, ancienne ministre de
l'Environnement de 1995 �* 1997, était présente. Elle revient sur le besoin
de débat public en France, qui en manque cruellement.
Le Journal de la Haute-Marne : Pensez-vous que le débat sur la gestion des
déchets nucléaires, lancé avec les auditions publiques, est utile ?
Corinne Lepage : C'est un faux débat. On laisse le choix aux citoyens entre
Bure et Bure, puisqu'il n'y a pas d'autre site envisagé. Sans compter que
l'information n'est pas donnée, ou alors de manière univoque. Je suis
choquée de la façon dont le débat public évolue en France.
JHM : La consultation est truquée, selon vous ?
C.L. : On fait croire qu'on débat avec la population, mais c'est totalement
formel : les décisions sont déj�* prises. C'est pour la façade, sans la
maison qui va derrière. Il faut réellement consulter la population, donc
organiser ce référendum demandé par les élus meusiens et haut-marnais
opposés �* l'enfouissement (elle l'a signé plus tôt dans la journée, Ndlr).
D'ailleurs, je lance un appel �* tous les départements pour organiser une
campagne de signatures afin de mettre en place des référendums sur le
nucléaire partout, comme la loi le permet.
JHM : Vous souhaitez l'arrêt complet du programme ?
C.L. : Sur ce point, mon avis diverge de celui des Verts. Je ne dis pas
"Stop tout de suite", mais "demandons l'avis des Français". Comme dans une
démocratie.