Mis en ligne le 25/04/2007
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Le professeur Henri Capron (ULB) ne nie pas l'existence de transferts entre la Flandre et la Wallonie.
Mais il démontre que cela ne concerne que 6 arrondissements.
Et que le rôle de Bruxelles y est proprement nié.
Cela restera peut-être comme la manifestation politique la plus grotesque de la décennie. On se souvient : le 7 janvier 2005, l'état-major du parti nationaliste flamand N-VA prenait la tête d'un cortège de 12 camions et avait fait route vers les ascenseurs de Strépy-Thieu considéré comme le symbole de la gabegie "made in Wallonia". Pourquoi 12 camions ? C'était le charroi considéré comme nécessaire pour transporter 11,3 milliards d'euros en coupure de 50 euros. Opération grotesque tout d'abord parce qu'�* supposer même que le montant total des transferts s'élèverait bien �* 11,3 milliards, trois camions auraient suffi pour transporter la somme. Opération grotesque surtout, parce qu'en sombrant dans la caricature, la N-VA a véhiculé des clichés trompeurs et falsifiés.
Henri Capron, professeur d'économie �* l'Université libre de Bruxelles, figure parmi ceux qui ont le plus étudié l'économie wallonne. Il vient de se pencher sur les transferts interrégionaux entre la Flandre et les deux autres régions du pays. Son étude - qui paraîtra sous peu, parmi d'autres contributions, dans un livre fort attendu "Réformer sans tabous" - révèle que la réalité des transferts est beaucoup plus compliquée qu'il n'y paraît, plus nuancée en tout cas.
Henri Capron commence : "
La réalité des transferts nord/sud ne peut être niée ." Mais l'économiste de l'ULB il dépasse ce simple constat en étudiant, comme s'il maniait une loupe, la réalité sous-régionale. Et l�*, surprise. On s'aperçoit que ces transferts interrégionaux ne concernent qu'un nombre limité d'arrondissements. Et que parmi les bénéficiaires, il y a... des arrondissements flamands.
Trois arrondissements (sur 43) concentrent 53,5 pc des transferts : ceux de Charleroi, de Liège et de Mons, tous les trois wallons. Parmi les arrondissements qui bénéficient de la solidarité nationale, on découvre aussi ceux d'Ypres, Ostende, Dixmude, Maaseik, Tongres, Furnes, Roulers, Courtrai, Eeklo, Hasselt et Tielt. Ensemble, ces arrondissements n'accaparent cependant que 14,1 pc du montant total des transferts, ce qui les place quand même loin de leurs homologues hennuyers.
Par ailleurs, plus de la moitié du financement de la solidarité nationale est supporté par trois arrondissements : ceux de Hal-Vilvorde, de Louvain et du Brabant wallon. Parmi les autres contributeurs, on retrouve, �* côté des arrondissements de Gand, Anvers, ceux de Namur et de Waremme, tous les deux situés en Wallonie. L'évidence des clichés se brouille d'un coup.
Bruxelles bénéficiaire
On ne manquera pas d'être frappé par deux choses.
La première, c'est que les transferts ne concernent réellement que 6 arrondissements - les 3 plus pauvres et les 3 plus riches.
La seconde, c'est que les trois arrondissements (Hal-Vilvorde, Louvain et Brabant wallon) qui contribuent le plus, et de loin, �* la solidarité nationale composent l'hinterland de Bruxelles. Pour Henri Capron, ce n'est pas un hasard. "
Cela met en évidence , observe-t-il,
le rôle joué par le pôle économique bruxellois dans la production des revenus qui, par un effet de débordement sur les régions voisines, sont �* l'origine des transferts de solidarité ." Or, et c'est le paradoxe, les statistiques livrées en Flandre ne rendent pas compte de l'importance de Bruxelles dans le financement des transferts. Au contraire même, la Région bruxelloise y apparaît comme une bénéficiaire nette. Et pour cause : les transferts sont calculés sur la base du domicile et non du lieu de travail des Belges. Cela défavorise Bruxelles où 220 000 Flamands et 125 000 Wallons viennent travailler chaque jour.
Dit staat vandaag in de libre Belgique.