Federale Regering : Inauguration du Square Stéphane Hessel

[Politics.be]

Aux grandes causes, nous le savons, sont souvent associées de grandes personnalités.Voltaire et la liberté de pensée, Jaurès et l’émancipation de la classe ouvrière, Tocqueville et la démocratie, Jean Moulin et la Résistance, Mandela et le mouvement anti-apartheid…A travers l’Histoire, ces personnalités d’exception ont incarné des idées et des combats. Elles leur ont donné leurs lettres de noblesse. Elles ont réussi, par leur talent et leur courage, �* changer le monde.Nous sommes réunis aujourd’hui pour rendre hommage �* un homme exceptionnel. Un homme qui était devenu une légende de son vivant et dont l’influence perdurera très longtemps.

Ce n’est qu’�* la fin de sa vie que Stéphane Hessel est devenu une conscience morale de son époque. Mais son appel �* l’indignation fut ressenti comme un coup de poing dans l’estomac par toute une génération.

Du haut de ses 90 ans, il nous parlait de notre monde, des valeurs dont nous sommes les héritiers et de notre responsabilité face �* l’avenir.

L’écouter était un vrai bonheur, et son message était toujours une leçon d’espoir.

Beaucoup, grâce �* lui, ont compris que les excuses et les alibis étaient sans valeur. Rien ne justifie jamais l’apathie. Rien n’excuse le renoncement. Rien n’est plus morbide que de se dire&nbs p;: « c’est comme ça, je ne peux rien y changer ».

Stéphane Hessel, dans sa longue existence, a vu le monde changer plusieurs fois par la volonté des hommes.

Il a connu l’avènement du nazisme et son écrasement par les Alliés. Il a connu la Guerre froide et la chute du Mur de Berlin. Il a connu tous ces combats qui ont transformé notre société en profondeur : la Sécurité sociale, l’émancipation des femmes, la presse indépendante, l’antiracisme, l’avortement, l’euthanasie, le mariage pour tous…

Cet ancien résistant fut aussi l’un des rédacteurs de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme. Pour lui, il était absolument évident que rien n’est jamais figé, que tout peut se faire ou se défaire. C’est la volonté des hommes qui commande les événements, et non l’inverse.

Ce n’est pas un hasard si un tel message a connu un tel retentissement voici quelques années.

L’appel de Stéphane Hessel n’est pas tombé �* n’importe quel moment. Il est tombé dans une époque où la globalisation économique pouvait donner �* chaque citoyen un sentiment de solitude et d’impuissance.

Le cynisme paraissait l’emporter sur l’idéal. Partout en Europe, le chacun pour soi et le consumérisme se donnaient la main pour faire barrage �* la rébellion, aux mouvements sociaux et aux politiques de progrès.

Stéphane Hessel nous a alors rappelé ce que l’on savait depuis Etienne de la Boëtie : la servitude est volontaire et le changement est toujours en notre pouvoir.

Je me souviens des polémiques nées de son livre « Indignez-vous ! ». Certains ont ironisé. Ils ont laissé croire que cet homme de combat en appelait �* une sorte de révolution en robe de chambre. Une insurrection devant son écran de télé !

Rien n’était plus faux. L’indignation, dans l’esprit de Stéphane Hessel, était bien sûr le préalable �* l’action.

Il faut d’abord, disait-il, aller chercher au fond de soi la force et la rage pour briser les fausses fatalités. Ensuite, on se mobilise et on agit dans le réel.

Alors oui, nous pouvons et nous devons nous indigner :

- Indignons-nous quand une entreprise licencie pour maximiser ses bénéfices.

- Indignons-nous quand la collectivité est contrainte de payer la crise des banques.

- Indignons-nous quand l’environnement ou la santé sont sacrifiés au profit financier.

- Indignons-nous quand un travailleur ne trouve pas d’emploi �* cause de sa couleur de peau, de son nom, de son âge ou d’un handicap.

- Indignons-nous quand une femme est battue, séquestrée ou insultée.

- Indignons-nous quand un enfant ne peut pas suivre des études faute de moyens financiers.

- Indignons-nous quand une personne âgé ne peut pas se nourrir, se chauffer ou se soigner…



Chers Etudiants,

C’est ici, dans ce lieu hautement symbolique de l’ULB, que le nom de Stéphane Hessel vous rappellera chaque jour l’importance de la politique.

L’indignation dont il était porteur est elle-même porteuse d’engagement. Un engagement �* agir de manière démocratique et constructive. Un engagement �* transformer la société pour la rendre plus juste et plus fraternelle.

Dans le monde troublé où nous vivons, il est important de prendre ses responsabilités, toutes ses responsabilités.

La politique est le lieu, par excellence, où l’on peut combiner la révolte et les changements démocratiques.

S’indigner, crier, dénoncer les injustices, c’est très bien. Mais cet élan serait bien inutile s’il ne débouchait pas sur des progrès tangibles.

Alors, je vous le dis : n’ayez jamais peur de prendre vos responsabilités et d’affronter le réel.

A la facilité des incantations, préférez le courage des actes.

Aux postures intransigeantes, préférez les efforts patients et les compromis qui permettent d’avancer vers son but.

C’est ainsi que notre monde continuera de s’améliorer. Pas �* pas, pierre par pierre, progrès après progrès. Vous aurez alors la satisfaction d’être utiles et de vous trouver du côté des bâtisseurs plutôt que des pleureurs.

Jusqu’au bout, Stéphane Hessel a voulu faire partager sa conviction que le progrès est possible, et que seul le cadre démocratique peut le garantir.

La voix de Stéphane Hessel, j’en suis convaincu, ne se taira jamais. Cette voix, belle et généreuse, nous accompagnera toujours.

Je vous remercie de votre attention.

Bron: politics.be